06 décembre 2023

Les émotions: Ils determinent votre comporement

Les émotions

Lorsque j’ai entendu parler de l’homo economicus pour la première fois à l’université, je me suis dit que le fonctionnement de l’économie était assez simple. Il m’est toutefois rapidement apparu qu’il ne suffisait pas de justifier chaque décision par des motifs purement économiques. Avec le temps, j’ai appris qu’il existait d’autres facteurs d’influence pertinents dont je n’avais pas conscience.

Ce sont les émotions qui influent sur notre comportement, et ce, bien plus que beaucoup de gens ne le pensent. Et surtout pour vous, en tant que cadre, il est crucial de considérer ces émotions au plus près afin de mieux comprendre vos collaborateurs et de mieux évaluer encore leur comportement.

Si vous imaginez que vous devez dres-ser une liste de caractéristiques de l’apparence et des valeurs de votre partenaire idéal, et ce, sur le plan pu-rement économique et rationnel, alors cette liste sera différente de celle établie pour la personne dont vous êtes tombé amoureux. L’homme en question Si vous imaginez que vous devez dres-ser une liste de caractéristiques de l’apparence et des valeurs de votre partenaire idéal, et ce, sur le plan purement économique et rationnel, alors cette liste sera différente de celle éta-blie pour la personne dont vous êtes tombé amoureux. L’homme en question ne répond en fait pas à vos critères, et la femme a des cheveux bruns au lieu de blonds. Comment expliquer les diffé-rences entre vos deux listes?

Décisions inconscientes et émotionnelles

En fait, le choix de vos partenaires a beaucoup plus à voir avec des déci-sions inconscientes et émotionnelles que vous ne le réalisez probablement au départ. D’une part, nous préférons les personnes qui nous ressemblent. On le constate également fréquemment lorsqu’on embauche du personnel. On choisira en effet la personne qui nous ressemble le plus. On dit toujours que ceux qui se ressemblent s’assemblent. Ce qui n’est pas tout faux.

Mais il n’y a pas que l’apparence, d’autres influences inconscientes sont également à la manoeuvre. Par exemple, une étude américaine menée dans les années 1950 a conclu que la moitié des couples qui se sont mariés dans l’État de l’Ohio provenaient du même quartier ou d’un quartier simi-laire. Une grande partie d’entre eux, 37%, vivaient même à quelques rues les uns des autres.

Succès et taille corporelle

Il existe en outre d’autres critères, comme les caractéristiques physiques, qui sont considérés comme importants. Le succès et la taille corporelle semblent être liés, selon Nicola Persico, Andrew Postlewaite et Dan Silverman. Des scientifiques autour du psychologue écossais Peter Caryl ont également constaté que les hommes aux grandes pupilles sont particulièrement attrayants.

Les chercheurs Timothy Judge et Daniel Cable voient les raisons de ce phénomène dans une perception inconsciente de la taille du corps. Les personnes de grande taille sont considérées comme sûres d’elles-mêmes, fortes et affirmées. On suppose donc qu’elles ont plus de qualités de leadership.

Par conséquent, ce que nous percevons comme beau et attirant n’est pas du tout aussi économiquement rationnel que nous le croyons. Les décisions que vous prenez dans l’entreprise sont également influencées de manière significative par vos préférences personnes dans telle ou telle la situation. On prétend souvent que les gens peuvent contrôler leur comportement. Les études et les recherches dressent un tableau différent. En effet, même des choses insignifiantes comme un simple mot ou un petit geste peuvent influencer inconsciemment le comportement.

Associations et contexte

Cette influence s’exerce souvent par le biais d’associations qui se produisent dans notre cerveau sans que nous nous en rendions compte. On a par exemple, dans le cadre d’une étude, demandé à des personnes testées de lire successi-vement les mots «bingo», «Floride» et «démodé». Les participants ont inconsciemment fait une association avec le fait d’être plus âgé. Une pensée qui a eu un effet tangible sur leur comportement: lorsque les personnes testées ont quitté la pièce après le test, elles ont marché nettement plus lentement que lorsqu’elles y sont entrées.

Un autre facteur d’influence important est le contexte particulier dans lequel vous rencontrez un sujet. Où auriez-vous le plus de chances d’acheter un bon vin, par exemple un Pomerol 2010 pour 25 euros? Au supermarché, où l’on trouve des vins à quatre ou cinq euros, ou chez un caviste exclusif, où l’on trouve des vins à plus de 1000 euros? La façon dont un produit est présenté a donc une influence considérable sur votre comportement d’achat.

En outre, la manière dont les différentes alternatives vous sont présentées est également déterminante. Vous serez par exemple plus enclin à vous pro-noncer en faveur d’une opération com-pliquée si le médecin traitant vous dit qu’elle a un taux de réussite de 86%. Alors que ce ne sera pas nécessairement le cas s’il vous disait que l’opération échoue malheureusement dans 15% des cas.

En d’autres termes, la façon dont vous évaluez une situation et prenez une décision est influencée par la manière dont elle vous est présentée. Et ce, bien que vous sachiez que les probabilités restent les mêmes.

Une justice biaisée

Même dans un système judiciaire sup-posé équitable, la décision des juges est influencée par des états émotionnels spécifiques. Les chercheurs ont découvert que nous jugeons les situa-tions différemment lorsque nous avons faim. Il est choquant de constater que ce résultat ne se limite pas aux juges, dont chacun attend un comportement hautement rationnel et objectif. L’équipe dirigée par le psychologue israélien Shai Danziger de l’Université Ben Gourion a étudié des affaires judiciaires. Elle a évalué le comportement des juges et les condamnations en fonction de ce qui a influencé le verdict, mais qui n’avait rien à voir avec l’affaire en question.

Les résultats n’ont malheureusement pas été aussi rationnels. Après un déjeuner, les juges ont été plus indul-gents dans leurs sentences et ont accordé deux fois plus de demandes de probation qu’avant un déjeuner. Les chercheurs ont constaté que plus les juges avaient faim, plus leurs sentences étaient sévères, et que les chances de réussite d’une demande s’approchaient de zéro avant le déjeuner.

La façon dont vous jugez une situa-tion dépend donc clairement de votre état émotionnel à un moment précis. Ce qui peut changer très rapidement, comme nous le savons tous. Vous êtes probablement en train de penser que les bonnes décisions sont prises par des personnes qui ne sont pas guidées par leurs émotions. Ce n’est pas tout à fait exact non plus. Car les personnes qui n’éprouvent aucun sentiment ne prennent pas de décisions particulièrement rationnelles, elles n’en prennent même aucune en général.

Les sentiments jouent un rôle important

Et cela a même été prouvé. Par exemple, le neuroscientifique portugais Antonio Damasio a étudié le comporte-ment décisionnel de personnes dont les zones cérébrales des sensations et des sentiments avaient été détruites par une attaque, une tumeur ou un accident. Il a constaté que les patients étaient souvent incapables de prendre la moindre décision. Cela allait si loin qu’ils ne se demandaient même plus s’ils voulaient aller déjeuner. Et la décision prise était souvent une mauvaise décision.

On peut dire pour conclure que vos sentiments jouent un rôle important dans vos décisions. Ils vous aident à en estimer l’impacct. Pensez par exemple à des sports extrêmes comme le parachutisme. Même pendant un saut en tandem, votre corps réagit avec un sentiment de panique et de peur. C’est fondamentalement une bonne chose. Parce que ce sentiment vous fait penser aux dangers possibles qu’implique votre action.

L’inconscient est utile pour les décisions

Les patients du professeur Damasio, en revanche, ne connaissent pas ces sentiments et ne peuvent donc pas évaluer les conséquences qu’une certaine décision aura pour eux. Autrement dit, un saut en parachute ressemble à une simple balade.

Nous agissons donc beaucoup plus par le biais de nos émotions et de nos sentiments que nous n’en sommes conscients. Notre inconscient nous aide à prendre des décisions et nous permet de les prendre plus rapidement, ce que l’on appelle l’intuition. Et c’est également important pour réussir dans un environnement de plus en plus complexe.

Examinons à nouveau l’influence du QI et du QE sur votre réussite. Il semble que les personnes ayant un QI élevé aient plus de facilité à l’école. Mais est-ce que cela conduit ensuite à plus de succès dans d’autres domaines de la vie. De nombreuses études ont montré qu’un QI élevé ne conduit pas automatiquement à une vie plus heureuse ou plus réussie. L’intelligence sociale en est la principale responsable. Il s’agit plus précisément de l’empathie, de la maitrise de soi et de la volonté. Les rédacteurs du Cambridge Handbook of Intelligence concluent même que le QI ne représente pas plus de 20% de la réussite personnelle dans la vie. Daniel Goleman, qui a fait connaitre le terme QE à un large public avec son livre «EQ», adopte un point de vue similaire. En particulier pour une carrière, un QI élevé, supérieur à 120, ne semble pas être une garantie de réussite professionnelle, comme l’a constaté le psychologue Richard K. Wagner.

Le test Marshmallow

La réussite professionnelle dépend es-sentiellement du degré de maitrise de soi. Par exemple, l’équipe dirigée par le psychologue Walter Mischel a pu mon-trer que le niveau de maitrise de soi des enfants est un bon facteur pour leur réussite ultérieure. Lors d’une expérience, il a demandé à des enfants de quatre ans de rester assis devant une guimauve pendant 20 minutes sans la manger. S’ils y parvenaient, ils en auraient un deuxième. La maitrise de soi était censée payer. Et effectivement, les enfants qui ont mangé la guimauve ont beaucoup moins bien réussi dans la vie que les autres. La maitrise de soi est donc un facteur crucial pour la réus-site personnelle. Vos décisions ne sont donc pas basées sur l’homo economicus, mais sont fortement influencées par les émotions, les sentiments et le subconscient.

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